Le grand voyage

Publié le par Catherine

Le grand voyage

J'étais devenue sa voisine un matin de janvier 2008 mais je le connaissais déjà de vue depuis 2002.

Il était là, tous les matins, devant sa porte, répondant d'un grand revers de la main à chaque automobiliste qui le saluait d'un petit coup de klaxon. Et on en entendait des coups de klaxons.

Longtemps il a traîné la dégaine de Lucky Luke et tout comme lui il avait troqué sa cigarette contre un brin d'herbe.

Sa Calamity Jane s'en était allée il y a tout juste quatre ans, le laissant nostalgique et un peu seul aussi, même s'il ne se passait pas un jour sans qu'un ami, la famille, un voisin, un connaissance ne franchissent sa porte.

C'était un personnage emblématique de notre longue rue. Convivial, haut en couleur, son humour tantôt grinçant, tantôt "léger", ne laissait pas indifférent.

Avec lui je parvenais à dédramatiser beaucoup de situations. J'aimais nos petites discussions.

Sous ses aspects parfois un peu rudes, il cachait un grand coeur.

C'était un homme d'ici. Il appréciait les moments conviviaux, ceux où l'on partage ripailles et bombances. Il aimait les chats et ceux-ci le lui rendaient bien.

Quand sa santé le lui permettait encore, il cultivait son potager. Dans son atelier il réalisait des travaux de ferronnerie. Il soudait métaux et amitiés avec le même talent.

C'était le genre de personne que je pensais immuable. Celui qui laisse un grand vide même s'il ne fait pas partie de votre intimité. Celui qui fait l'identité d'un quartier. Celui qui s'inscrit dans votre quotidien sans même que ni lui ni vous ne vous en rendiez compte.

Il est parti et laissera un grand vide dans nos coeurs.

"La vie est une succession de départs. Tous intolérables. La résistance du cœur est incalculable."
La mort de Gilgamesh de Myriam Mallié
 
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